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Article
11 juin 2024
par Thomas Le Gourrierec

Bouteilles interstellaires - Episode 2 : Les américains ont-ils vraiment caché un musée sur la lune ?

Dessins de David Novros, John Chamberlain, Forrest Myers, Claes Oldenburg, Robert Rauschenberg et Andy Wahrol

Missive obscure, ingénieur téméraire et œuvres miniaturisées : en 1969, la mission Apollo 12 abandonnait sur la Lune un musée regroupant des créations d’artistes de l’époque, parmi lesquels Andy Warhol. Incroyable réalité ou jubilatoire légende ? Le mystère demeure entier malgré de troublants éléments d’enquête…

Forrest Myers ne sait toujours pas qui a bien pu lui adresser ce morceau de papier jaune. C’était il y a plus de 50 ans, le 12 novembre 1969. Ce soir-là, alors que le jeune sculpteur américain est occupé à dîner dans son appartement new-yorkais, la sonnette retentit. Myers ouvre la porte, un employé de la Western Union lui remet un mystérieux télégramme.

La missive provient de Cap Canaveral, en Floride, d’où doit décoller deux jours plus tard la mission Apollo 12. Le destinataire fronce les yeux, découvre un court message écrit en lettres capitales, qui semble couronner de succès une énigmatique mission : « YOUR ON ‘A.O.K. ALL SYSTEMS ARE GO ». La phrase est signée d’un certain « JOHN F ». Myers est parcouru d’un frisson. Son opération secrète a fonctionné…

Mais quel lien ce jeune homme de 28 ans à la solide carrure et à la moustache broussailleuse, figurant à l’époque parmi les artistes les plus en vue de la scène new-yorkaise, peut-il bien avoir avec la NASA ? En parallèle de ses activités officielles, il est en fait fasciné par l’exploration spatiale. Et rêve, après avoir avidement suivi les exploits d’Apollo 11 et les premiers pas de l’Homme sur la Lune, d’inviter l’Art sur la mission Apollo 12…

De quelle manière ? En constituant un petit musée qui aura vocation à être déposé sur l’astre d’argent par le vaisseau spatial de la NASA. Pour cela, il a sollicité des amis artistes en leur demandant de réaliser chacun une œuvre destinée à effectuer le grand voyage.

David Novros, l’un des premiers peintres minimalistes, dessine une forme géométrique rappelant un circuit électrique, tout comme John Chamberlain, connu pour ses sculptures à renfort de débris de véhicules. Myers opte pour un symbole abstrait. Le sculpteur suédois Claes Oldenburg représente Mickey Mouse, tandis que le précurseur du pop art Robert Rauschenberg verse dans l’ultra-minimalisme en traçant une simple ligne. Invité star du projet, Andy Wahrol croque une fusée… qui fait également songer à une partie d’anatomie très intime.

« Your on ‘A.O.K. All Systems are GO. »

JOHN F

Reste à caser ces créations sur le vaisseau spatial. Loin d’être une mince affaire, considérant que chaque kilo à destination de la Lune vaut son pesant d’or ! Myers a alors l’idée de miniaturiser les œuvres. Il fait appel à Fred Waldhauer, ingénieur chez Bell, qui parvient à les incruster sur une petite plaque de céramique mesurant 1,4 cm de large sur 1,9 cm de long.

Afin de réaliser ce tour de force, l’homme a mis en œuvre un procédé d’ordinaire utilisé pour façonner des circuits téléphoniques. Entre 16 et 20 plaques, au total, seront produites. Ne reste plus qu’à contacter la NASA pour la convaincre d’en emmener une. Malheureusement, l’idée de Myers ne semble pas émouvoir l’agence américaine…

Un temps sonné, l’instigateur du projet fou reprend du poil de la bête. Qu’importe, il fera embarquer clandestinement son micro-musée à bord du vaisseau spatial ! Pour mener à bien cette manœuvre, son acolyte Waldhauer sollicite l’un de ses contacts, ingénieur lui aussi, au sein de la firme Grumman Aircraft. Celle-ci construit les modules lunaires destinés à se poser sur la Lune…

L’homme accepte de prendre part à la mission secrète. Selon certains experts, il aurait caché la petite plaque supportant les œuvres dans le repli de l’une des couvertures thermiques qui recouvrent les jambes de l’Intrepid, le module lunaire ayant atterrit victorieusement avec l’équipage d’Apollo 12.

Il savait pertinemment que l’équipage, en s’arrachant du sol poussiéreux de l’astre après près de huit heures d’exploration, se débarrasserait des pieds du module lunaire, restés depuis sur place. L’un d'eux contient-il véritablement le micro-musée ? Impossible de l’affirmer catégoriquement, même si la probabilité apparaît très élevée. Le mystérieux agent double, qui pourrait bien être le fameux « JOHN F » du télégramme, n’a jamais été identifié. Quant à Fred Waldhauer, il est, depuis, décédé. Le mystère du Moon Museum demeure entier…